A la Pinte du Nord
Rendez-vous à la pizzeria de la rue Saint-Quentin, surnommée la Sainte Cantine, avec un pote, ce midi.
Je suis en avance, je m'arrête dans un troquet un rien miteux, La Pinte du Nord, espérant que le prix du café sera abordable, les estaminets qui font face à la Gare du Nord ayant tendance à se la jouer Saint Trop' au mois d'août, niveau tarification.
Derrière le comptoir, deux sexagénaires à moustaches mitées, l'un semble être le patron, l'autre l'employé. Au fond de la salle, une télé perchée tout en haut d'un mur jaunâtre braille un reportage sur les volailles élevées en plein air. Le rural interviewé connaît son sujet et explique avec passion la façon de transformer un poulet en chapon. Il jacte en abondance, tout en caressant un volatile affolé qu'il tient fermement sous le bras. Cot Cot roule des yeux exhorbités et agite la crête en tous sens, se doutant semble-t-il qu'il vit là son quart d'heure de célébrité Warholien et qu'il ne passera plus jamais à la télé avant de passer à la casserole.
Les papys Mougeot du comptoir commentent allègrement et soulignent combien le reportage est pertinent et indispensable et qu'on aimerait voir de telles images plus souvent, alors qu'on nous abreuve de Fashion Weeks et de poules décharnées portant tissu.
Fin du programme. La télé est éteinte et le patron feuillette un canard (on ne sort pas de la ferme !)
- Qui c'est, cette Julie Gayet ?
- C'est une actrice. Elle a bien joué son coup ! On la connaissait pas, ben maintenant on la connaît !
- J'aurais pas pensé qu'il ferait ce genre d'entourloupe, Hollande. Il a pas le profil play boy, le petit gros !
- Oh... moi je m'en doutais. C'est un galopin, je te dis, le genre à faire les sorties de lycée. Il a un air à deux airs qui trompe pas.
- Ah... j'aurais pas cru. Et dis donc, qu'est-ce qu'elle va faire la Valérie, ses valoches ?
- Ah ah ah ah ! Ouais, va falloir qu'elle se tire Weiller ! Ah ah ah ah ah !
Un café : 2,50 euros.