Dreamland
Il faut que j'écrive, chaque jour, ici. Que je m'y astreigne.
Les quelques lecteurs qui restent m'ancrent dans le réel.
Depuis quelques semaines, j'ai peur de passer de l'autre côté.
Mes rêves sont de plus en plus prégnants.
J'ai toujours aimé m'en souvenir, toujours attendu ce moment, au matin, où la conscience affleure à peine et où les portes des rêves, de tous mes rêves, deviennent poreuses.
Il me suffit alors de cultiver un état intermédiaire, de nager souplement entre deux eaux, et l'univers de mes aventures inconscientes et nocturnes se révèle.
Je me suis souvent livrée à l'exercice, avec délice et curiosité.
Depuis quelques semaines, les portes sont grandes ouvertes et leur béance me happe toute entière.
Plus question de nage languide, un courant furieux me précipite dans un tourbillon, et ce que j'y vois, ce que j'y vis, me fais douter de ma propre réalité.
J'écris ici. Mais suis-je ici ou est-ce un rêve ?
Ce matin, j'étais ailleurs, au bras d'un homme en noir.